Questions posées à Michèle Rivasi, professeur, agrégée en biologie de l'Ecole normale supérieure et fondatrice de la Criirad et du Criirem, maire adjointe de la ville de Valence,
candidate aux élections européennes en Rhone-Alpes.
Souce: lemonde.fr et http://montagne-protection.org/monts-pyrenees_00002c.html#an9
Question : Différences de nature entre les ondes émises par les antennes-relais et le Wi-Fi ?
Michèle Rivasi : Les antennes-relais ont des fréquences qui varient de 900 MHz (GSM) à 2 250 MHz (...). Le Wi-Fi est à 2 450 MHz et a la même fréquence que le micro-ondes. Sauf que la puissance est beaucoup plus faible. On commence également à installer des antennes Wimax dont la fréquence est de l'ordre de 3 GHz (3 000 MHz).
Question : Que dire de ces "zones blanches" que les opérateurs de téléphonie mobile seraient "obligés" de couvrir ? Quelle est la portée du Wi-Max ? (plus de 50 km ?) Où iront se réfugier les personnes électrosensibles (même les zones de montagne seront alors "couvertes"...)
Michèle Rivasi : Il faut reconnaître l'électrosensibilité comme un handicap (cf. législation en Suède). Ce qui permettra d'avoir de véritables zones blanches où il n'y aura absolument pas de champ électromagnétique. On a fait des réserves sur la biodiversité, il faudra faire des réserves sur des zones sans champ électromagnétique
Question : Y a-t-il un lien qui se dessine entre tumeur du cerveau (même non cancéreuse) et la présence d'antenne(s) Wi-Fi et/ou relais ?
Michèle Rivasi : Il y a plusieurs études qui ont montré une présomption de preuve entre l'apparition de tumeurs et la présence d'antennes. Il est très difficile d'établir une relation de cause à effet directe dans ces phénomènes, et on parle plutôt de présomption de preuve, élément suffisant pour l'application du principe de précaution.
Question : L'argument des "pro-Wi-Fi" selon lequel aucune étude sérieuse n'aurait prouvé de danger lié aux micro-ondes à des doses équivalentes à celles que nous recevons tous les jours est-il recevable ? Dans quelle mesure ?
Michèle Rivasi : Sur le Wi-Fi, il y a eu des études qui ont montré qu'à ce type de fréquence - 2 450 MHz - on observe des effets sur la génotoxicité (rupture des brins d'ADN), mais il n'y a pas eu d'étude sanitaire à grande échelle au niveau de la population. Par contre, on a observé chez des personnes dans des bibliothèques à Paris qui avaient des bornes Wi-Fi à proximité le syndrome des micro-ondes (insomnies, maux de tête, manque de concentration, nausées...), caractéristique des effets des hyperfréquences.
Question : Pouvez-vous nous expliquer brièvement les différences entre les natures des ondes émises par les antennes-relais et le Wi-Fi ?
Michèle Rivasi : Les antennes-relais ont des fréquences qui varient de 900 MHz (GSM) à 2 250 MHz (UMTS 3G, 3e génération). Le Wi-Fi est à 2 450 MHz et a la même fréquence que le micro-ondes. Sauf que la puissance est beaucoup plus faible. On commence également à installer des antennes Wimax dont la fréquence est de l'ordre de 3 GHz (3 000 MHz).
Question : Pour certains scientifiques, les effets du Wi-Fi sur les noyaux cellulaires semblent fort différents du simple effet thermique "micro-ondes". Que penser alors de l'application de réglementations qui ne prennent en compte que l'effet thermique du Wi-Fi ?
Michèle Rivasi : La réglementation sur les ondes électromagnétiques ne prend en compte que les effets thermiques, et non pas les effets athermiques, qui peuvent provoquer des effets biologiques sur les cellules humaines et le cerveau humain : diminution de certaines hormones, dont la mélatonine, modification de l'électro-encéphalogramme, rupture de la barrière hémato-encéphalique (barrière sang-cerveau), et effets génotoxiques. Tous les scientifiques honnêtes sont d'accord sur les effets biologiques. En revanche, il y a une polémique sur les effets sanitaires, car pas suffisamment d'études au niveau de la population. Ou alors des études non publiées (exemple : interphones, étude européenne de 2003 toujours non publiée).
Question : Savons-nous si les ondes Wi-Fi sont nocives pour le développement du fœtus ? du nouveau-né ? et de l'enfant ?
Michèle Rivasi : Les ondes électromagnétiques affectent davantage les cellules en voie de division que les autres (métabolisme, rupture d'ADN) et donc c'est là que le principe de précaution doit être le plus appliqué (des expériences du professeur Bastide sur des œufs de poule à proximité de téléphones portables ont montré la dégradation et la mort des embryons de poulets).
Question : Y a-t-il un lien entre l'utilisation massive des micro-ondes via les téléphones portables et la disparition des abeilles ?
Michèle Rivasi : Des expériences ont été faites sur des abeilles, où l'on a mis à proximité des ruches des téléphones mobiles. Les effets observés étaient que les abeilles ne retrouvaient plus la ruche et qu'il y avait une diminution du couvain à l'intérieur de la ruche. D'autres expériences sur les cigognes ont montré qu'il y avait une augmentation de l'agressivité et une diminution du nombre d'œufs à l'intérieur du nid (attention à l'augmentation de l'agressivité des couples à proximité d'une antenne !).
Question : La barrière sang-cerveau subit-elle réellement des dégats irréparables au bout de 2 heures de communication avec un téléphone portable ? Quelles en sont les conséquences ?
Michèle Rivasi : Ce qui a été montré, c'est que quand le cerveau est soumis à des champs électromagnétiques, il y a une porosité de la barrière, ce qui fait que de grosses molécules qui jusqu'alors ne pouvaient pas passer peuvent pénétrer à l'intérieur du cerveau, ce qui pourrait expliquer les migraines observée chez des gens soumis à des champs électromagnétiques. Deuxième chose : les cellules ont un pouvoir de réparation très important, donc tout va dépendre de l'importance de l'irradiation pour que le système de réparation puisse fonctionner.
Question : La nouvelle norme (802.11n) révolutionnant le Wi-Fi (sur le débit, portée...) et fonctionnant sur 2.4 et 5 Ghz aggrave-t-elle le problème?
Michèle Rivasi : Tout ce qui touche au Wi-Fi, s'il n'y a pas d'étude à la fois sur les effets biologiques, les effets sur les plantes et les animaux, et en dernier sur l'homme, on ne doit pas accepter la généralisation de ces technologies. C'est une position de principe qui aurait évité de nombreux morts, comme ceux causés par l'amiante. Le problème est qu'il n'y a aucune étude relative à toutes ces nouvelles fréquences, il n'existe que quelques études disponibles sur les sites Criirem.org, Robindestoits.org, Priartem.fr...
Question : Pourquoi ne pas appliquer le principe de précaution pour abaisser les seuils des champs électromagnétiques (comme en Belgique par exemple) ?
Michèle Rivasi : Parce que les lobbies français ne veulent pas réduire la puissance des antennes pour des raisons financières et qu'ils désinforment les élus et la population en leur disant que si on multiplie les antennes, c'est le portable qui va émettre davantage pour chercher l'antenne. Des expériences réalisées à Salzbourg, en Autriche, où on installe des picots et des micro-antennes avec une puissance faible où les personnes du public ne sont pas exposées au-delà de 0,6 volt par mètre, montrent un fonctionnement correct.
Question : La France est-elle en avance ou en retard sur les antenne-relais par rapport aux autres pays européens ?
Michèle Rivasi : La France est en retard sur des alternatives techniques qui pourraient faire fonctionner le téléphone portable avec des antennes beaucoup plus petites et moins puissantes. Il y a une entente entre les trois opérateurs français, qui sont à l'origine de ce retard.
Question: En tant que candidate pour Europe Ecologie dans le Sud-Est, que comptez-vous faire valoir lors du Grenelle des antennes cette semaine ? Avez-vous des propositions à soutenir au niveau européen ?
Michèle Rivasi : Sur le Grenelle des antennes, qui est sur le plan français, on veut aboutir à deux choses : l'application des douze réflexes concernant l'utilisation du téléphone portable, visibles sur le site du Criirem (www.criirem.org), et l'expérimentation dès demain dans les centres-ville de picots-antennes à faible puissance. Et troisième chose : l'information des élus, de l'administration et des opérateurs de la résolution du Parlement européen qui est de revoir les normes actuellement en vigueur en France et dans d'autres pays. Un rapport qui vient de sortir dit qu'il ne faut pas dépasser 3 volts par mètre. Personnellement, je voudrais qu'on aille au-delà, à 0,6 volt par mètre, car ayant effectué des mesures dans des appartements, entre 1,5 et 3 volts, certaines personnes déclenchaient le syndrome des micro-ondes. >>
Nous recommandons également des alternatives par câble aux systèmes Wi-Fi, en particulier dans les écoles et les bibliothèques, afin que les enfants ne soient pas soumis à de forts niveaux de MO/RF avant que l'on en sache davantage sur les éventuels effets sur la santé.
Intervention de Michele Rivasi en Novembre 2007 (La Croix)
Il faudrait au minimum que toutes les antennes, toutes les sources d'exposition soient répertoriées. Il faudrait aussi que les particuliers débranchent leur réseau lorsqu'ils ne s'en servent pas. À quoi bon s'exposer et exposer ses voisins des nuits entières ? »
La communication du gouvernement donne à penser qu'il ne souhaite ni légiférer, ni règlementer dans le domaine des antennes. Nous considérons que cette position de déni d'un risque sanitaire des ondes électromagnétiques est inacceptable.
Nous demandons que soit établi un cadre législatif et réglementaire pour le développement des technologies nouvelles que nécessite la téléphonie portable.
(...)
Le caractère pathogène des ondes électromagnétiques émises par les antennes fait appel à des mécanismes physiopathologiques non encore élucidés. Des patients consultent cependant pour des symptômes très variés, la corrélation avec les ondes électromagnétiques étant établie par le fait que les symptômes disparaissent lorsqu'ils ne sont plus soumis à leur champ. Au-delà des ces personnes dites « électro-sensibles », c'est l'ensemble de la population qui est exposée aux champs électromagnétiques émis par les antennes, et nous n'en connaissons pas encore les effets à long terme. Nous demandons qu'un système de « vigilance » soit mis en place, indépendant des opérateurs de téléphonie, et que la puissance des émetteurs soit réduite dès maintenant.
Nous rappelons que l'absence de précaution et des expertises médicales douteuses au service du lobby industriel ont pu permettre le « scandale de l'amiante ». Nous rappelons que la position de déni des risques d'irradiation, adoptée par les pouvoirs publics après l'accident nucléaire de Tchernobyl, a été condamnée ensuite par la justice.